Le Cinéma des Années 50 à 60 - Site L'Atelier de Colette

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Le cinéma des années 50 à 60                                             

A Pamiers il y avait trois cinémas :

Le Théâtre Municipal, dont les murs appartenaient à la mairie, jouxtait la Caisse d’Epargne, en haut de la rue Charles de Gaulle.
Ce beau bâtiment abritait un théâtre à l’italienne avec une très grande scène, des fauteuils-claquettes à l’orchestre et de beaux fauteuils en velours rouge au balcon et dans les corbeilles.
Un peu désuet tout de même.
L’exploitation du cinéma était la propriété de Mr. et Mme Rouzé, charcutiers, dans le quartier de Loumet.
Il devait y avoir un cahier des charges car cette immense salle servait à la remise des prix en fin d’année scolaire. Les primés montaient sur scène et devant une tribune d’enseignants et de directeurs des lycées recevaient leur prix enrubanné de rouge accompagné souvent d’un ou deux livres. Les parents dans la salle se gonflaient alors de fierté.
Je n’ai réussi à avoir qu’un ou deux accessits mes résultats scolaires étant souvent en dents de scie à partir du secondaire.

Une fois par an les employés municipaux enlevaient tous les fauteuils de l’orchestre pour faire place à un bal.
C’était toujours un évènement. Nous mettions alors nos plus belles robes et accompagnées de nos mamans nous attendions avec fébrilité le cavalier qui nous ferait danser.

Ce bâtiment, hélas, a été détruit plutôt que restauré pour faire place à un bloc de béton. Quel dommage !

Le « Familia » était situé au milieu de la rue Gabriel Péri.
Il était tenu par Mr. et Mme Testard les propriétaires. Une grande et forte femme qui avait son franc parlé. Son mari plus discret avait l’air d’être toujours d’accord avec elle.
Sur la rue et sous un porche, deux guichets à petites fenêtres arrondies permettaient d’acheter les tickets. On ne voyait que les mains du vendeur, il fallait se pencher si on voulait discuter avec lui.
                                                                                          
Après avoir passé le porche, on entrait dans une cour. Au fond de celle-ci une grande salle que j’ai toujours connue fermée.

La salle de cinéma se trouvait à l’étage. Elle n’était pas très grande et devait posséder si mes souvenirs sont bons environ 250 ou 300 places.

Enfin il y avait le cinéma REX tel que je l’ai décrit dans mon précédent récit.
De construction plus récente il avait belle allure.

Après la guerre la France s’équipa de plus en plus de salles de cinéma. On en comptait à peu près quatre mille à quatre mille cinq cents. La moindre petite ville possédait son cinéma, deux ou trois selon le nombre d’habitants.
Dans les grandes villes, outre les grandes salles, chaque quartier possédait la sienne.

Eddy Mitchell dans sa superbe émission « la dernière séance » a su traduire l’ambiance des cinémas de l’époque : le documentaire, les actualités, l’entracte avec les chocolats glacés et le grand film.

La plupart des salles appartenaient à des indépendants venus d’horizons divers voyant là un moyen de bien gagner sa vie.

L’apogée de la fréquentation de spectateurs se situe en 1959 soit environ quatre cent millions.
L’arrivée progressive et massive de la télévision dans les foyers entama ensuite son déclin.

Côté professionnel la partie était rude pour se procurer le film qui devait en toute logique faire entrer un maximum de spectateurs dans la salle.
Chaque maison de Distribution avait un ou deux représentants qui parcouraient la région concernée. Celle de Toulouse, qui dépendait en réalité de celle de Bordeaux, comprenait les départements de la Haute-Garonne, du Tarn, de l’Ariège, du Tarn et Garonne, des Hautes-Pyrénées, du Gers et du Lot.
Pas moins de trente grandes ou petites maisons de Distributions avaient leurs bureaux à Bordeaux et seulement quatorze à Toulouse.
C’est dire que les représentants basés à Bordeaux dont les maisons n’avaient pas de bureaux à Toulouse faisaient beaucoup de kilomètres et visitaient beaucoup de salles.

Je n’aimais pas lorsqu’un représentant venait chez nous car généralement il arrivait sur le coup de midi.
Il y avait le rituel apéritif. Les discussions commençaient après avoir pris des nouvelles de la famille, de la santé, du temps qu’il faisait, du chien malade et autres préambules.

J’arrivais du lycée et dans ces cas-là je déjeunais seule, mon temps était compté. Lorsque je revenais vers 17 h le représentant était toujours là. Je me réfugiais alors dans la cuisine pour faire mes devoirs.

Les discussions pouvaient se poursuivre au moment de la séance après avoir fait un tour dans les autres salles le représentant attendait d’avoir établi le meilleur contrat.
Car bien entendu il n’y avait pas que les films de tête de liste, il y avait les autres, ceux dont personne ne veut, ceux qui n’attiraient pas les foules, « les petits films » avec des acteurs pas ou peu connus et ceux que l’on appelait souvent à tort « les navets ».
Il fallait tout vendre ou partager entre les salles.
(Quand je dis vendre c’est en réalité un pourcentage sur les recettes, 30% pour le distributeur).
Mais chaque exploitant voulait le film le plus vendeur évidemment, celui de la tête de liste.

Pour le cinéma REX la chose était beaucoup plus ardue. Les murs appartenaient à l’Eglise. Toutes les salles sous l’égide du clergé devaient respecter « la côte morale », pas au-delà du 4a.

La Centrale Catholique du cinéma fut créée en 1927 sous la directive du pape Pie XI.
Elle devenait la garante d’une moralité irréprochable pour ses fidèles vis-à-vis de ce nouveau divertissement.

Les notations allaient de 3 (pour tous) 3b (pour tous malgré quelques restrictions pour les enfants) 4 (visibles par les adultes) 4 a (visibles par les adultes avec des réserves) 4 b (à déconseiller, moralement dangereux pour la majorité des adultes) 5 (à rejeter, s’abstenir pour la morale chrétienne et pour donner l’exemple).

Ainsi au cinéma REX les spectateurs étaient certains de ne pas pêcher en regardant les films et de repartir l’âme sereine mais cela ne faisaient pas toujours l’affaire de mes parents.



L’indicateur du film, crée en 1937 était l’outil indispensable à la profession moyennant abonnement annuel.
Il comprenait toutes les coordonnées des maisons de Distributions et leur catalogue mais également celles des fournisseurs de matériel de cabine ou autres équipements professionnels ainsi que la liste de tous les films accompagnés de leur cote mais aussi des films interdits aux moins de 16 ans.

Dans l’exemplaire que je possède n° 6 datant de l’année 1959 voici quelques exemples:

Interdits aux moins de 16 ans (104 en tout) :
Ah les belles bacchantes
L’amant de Lady Chatterley
La bête humaine
En cas de malheur
Et Dieu créa la femme
Quai des brumes

Pour les cotes :
La bête humaine 5
La chate sur un toit brûlant 4
La femme du boulanger 5
Marius 4 a
Pépé le Moko 5
Les sorcières de Salem 4a/4c
Le diable au corps  5
Quai des brumes    5
Le corbeau             5


Le comité de censure après avoir visionné les films justifiait les notes par des commentaires cités ci-dessous qui font prendre conscience de l’évolution des mœurs et font sourire.

Alice aux pays des merveilles (W.D. 1951)
Rien à dire du point de vue moral. Le public doit cependant savoir que le caractère abracadabrant et parfois impressionnant de ce film risque de heurter de très jeunes enfants sensibles.

Fanfan la tulipe (C. Jaque 1952)
Le dialogue et des scènes suggestives obligent à des réserves morales.

Un caprice de Caroline chérie (J. Devaivre 52)
Malheureusement les déshabillages renouvelés de Martine Carol et la mentalité-libertine prêtée à son personnage, à quoi il faut ajouter un langage dévergondé, font rejeter ce film par tous ceux qui ont un souci de propreté. Cote 5 (et toc !)   
La Centrale catholique verra sa fin dans les barricades de mai 68.

Le cinéma du quartier de la Côte Pavée à Toulouse, le Tivoli, était dirigé par Monsieur le curé Redon.
Au cours d’une visite, un représentant de film entre dans la salle d’attente. Quelle ne fut pas sa surprise d’y trouver un groupement d’ouailles féminines chapeautées et l’air pincé.  
-Que se passe-t-il Monsieur le Curé ? demande-t-il en entrant dans son bureau.
-Ne m’en parlait pas c’est à cause de Bardot.
Elles viennent s’indigner.

Il arrivait que certains metteurs en scène consultent le comité de censure (comme J.P. Melville par exemple) afin d’adapter certains scènes.
Ce même comité pouvait également encourager les opérateurs à couper certains passages.
Souvenez-vous de la scène des baisers dans le film « Cinéma Paradiso » de Guiseppe Tornatore.
L’opérateur joué par Philippe Noiret coupait consciencieusement les passages censurés de tous les films qui n’étaient en réalité que des scènes de baisers.
Jacques Perrin, devenu cinéaste, revient sur les lieux de son enfance pour l’enterrement de son ami l’opérateur. Le cinéma est fermé mais la cabine est intacte. Contre le mur sont accrochées des morceaux de pellicule qui n’étaient autres que les scènes de baisers. Jacques Perrin en fait un montage qu’il projette devant des spectateurs ébahis. Une scène particulièrement émouvante.

Ce film, vous vous en doutez, m’arrache le cœur tellement j’y retrouve mon papa et mon enfance.


Je terminais cette année scolaire, qui m’avait coupée en deux, deuxième  au classement avec les félicitations de la directrice.
En juin je passerai avec beaucoup d’appréhension l’examen d’entrée en 6° qui sera supprimé l’année suivante. Pas de chance !

A part la question du logement, toujours en attente, mes parents ne se plaignaient jamais. Ils suivaient leur route et affrontaient les difficultés avec courage et détermination comme ils l’avaient toujours fait.

Dans quelques mois j’allais faire ma communion solennelle. Ce sera une formidable occasion de faire venir la famille et les amis que nous n’avions pas revus depuis notre départ.

Nous commencions les répétitions et pour l’occasion on côtoyait les garçons des autres quartiers.

Ma robe de communiante fut prêtée ainsi que le voile par notre boulangère de la rue Jacques Fournier dont la fille avait fait la communion l’année précédente.
Maman avait acheté la couronne de fleurs blanches à petites fleurs comme c’était recommandé. Une exception cependant pour Geneviève, la fille du docteur, qui arborait fièrement une couronne à grosses fleurs qui lui venait de sa famille.

En juin, peu avant la confirmation, nous avons fait retraite dans le parc du château de Lahondès sur la route de Belpech.
Nous nous sommes installés à l’ombre des grands arbres. On nous raconta des histoires de Saints et Saintes et nous avons chanté avec un bel enthousiasme.
Mais il faut bien dire que notre excitation se centrait plutôt sur la fête prochaine et les cadeaux que nous allions recevoir.
Pas grave on se confessera et nous serons absouts de tous nos péchés  grâce à deux ave et trois pater.

Mais allez savoir pourquoi je fis un énorme caprice pour que ma mère m’autorise à faire une permanente. Elle capitula  devant mon obstination en se disant peut-être que je regretterai ma décision. J’avais de si beaux cheveux épais et ondulés après l’intervention de la coiffeuse et la pose de petits rouleaux j’étais frisée comme un mouton.
En me regardant dans la glace j’affichais mon triomphe devant ma mère médusée. Mais au fond de moi une petite voix, celle que vous voudriez faire taire mais qui persiste à vous dire que vous avez eu tort, me disait « mais regarde donc cette tête ridicule ! ».

Les invités arrivèrent la veille de la cérémonie. Certains ont été hébergés chez nous malgré notre inconfort, d’autres dormiront en face de la maison à l’Hôtel de la Paix.
Quel bonheur de revoir ma marraine, les cousins, les amis.

Je reçus une montre Lip de la part de mes parents achetée à la bijouterie Lafont-Trouche rue Gabriel Péri, un missel, une croix en or de la part de cousine Madeleine. Elle me dit que n’ayant pas trouvé ce qu’elle voulait elle avait fait fabriquer le bijou. Cette cousine a toujours eu des attentions délicates envers moi. Ses cadeaux étaient toujours réfléchis et savaient me toucher.
Alors que j’avais 8 ans nous étions en vacances dans l’Aveyron pays d’origine de mon père et de son cousin, nous avons fait une visite à l’abbaye de Conques. Madeleine m’entraina dans une bijouterie et m’acheta un bracelet en argent ciselé de petites roses. J’ai porté ce bijou de très nombreuses années jusqu’à ce que mon poignet ne l’accepte plus.
Je reçus également d’autres cadeaux tous venants du cœur.

Après une nuit courte pour avoir dormi avec ma tante et ma cousine dans le même lit, je revêtis la belle robe en organdi, le voile recouvert de la couronne de fleurs, des chaussures blanches flambant neuves et des gants en dentelle de coton sans oublier le chapelet en nacre.
Nous nous dirigeâmes en cortège vers l’Eglise du camp en remontant la rue Lakanal. Tout ce petit monde « endimanché » était joyeux et moi un peu stressée.
Dans l’Eglise nous nous sommes installés à nos places désignées, les filles d’un côté, toutes blanches vêtues, les garçons de l’autre avec leur costume agrémenté d’un beau brassard blanc accroché sur leur bras gauche.
Il faut le dire tout cet apparat avait de l’allure.

A la sortie de la messe les communiants échangeaient entre eux une image pieuse imprimée de leur nom et de la date de la cérémonie.

Dans la grande pièce qui nous servait de salle à manger des tables avaient été dressées, de simples planches sur des tréteaux, recouvertes de draps.
Mes parents avaient pris un traiteur qui sur un petit réchaud faisait chauffer les plats. Je ne me souviens pas du menu mais je sais qu’il a été servi du vin de Bordeaux.

Après le repas, joyeux, bruyant et chantant, j’ai remis le jupon, la robe, le voile, la couronne, les chaussures, les gants pour assister aux vêpres. Interdiction de porter les bijoux offerts, seul le missel tout neuf fut autorisé.
Les hommes avaient trouvé des prétextes pour ne pas assister à cette corvée. Nous ne les avons pas dissuadés.

La journée s’acheva par un dîner frugal. Les discussions ont eu lieu tard dans la nuit nous étions tellement heureux de nous être retrouvés autour de cette fête de famille.

Le lendemain il y eu des départs, des cœurs tristes, des embrassades un peu trop prolongées, des larmes pour moi qui réalisait qu’une grande distance allait encore nous séparer.

Quelques semaines plus tard un petit groupe dont je faisais partie s’est rendu au Carmel. Dans une salle impersonnelle dallée de pierres nous nous sommes présentées devant un tourniquet. Chacune d’entre nous avons remis sur le plateau notre image pieuse en adressant quelques mots à la mère supérieure que nous ne voyions pas.
J’ai été très impressionnée d’apprendre qu’à l’intérieur de ce couvent il y avait des sœurs qui avaient fait vœu de silence. A la suite de cette visite j’ai eu une petite période mystique qui n’a vécu que ce que vivent les roses, l’espace d’un matin.

      

Cependant les cousins de Paris, Madeleine et Raymond, restèrent une semaine.
Ce fut l’occasion de découvrir enfin notre nouvelle région.
Papa avait pris récemment un opérateur et un ami avait consenti à remplacer maman à la caisse.
Nous avons alors découvert des endroits que nous referons à chaque passage d’amis ou de famille.
Papa conduisait et faisait le guide touristique.

Ax les termes avec la halte incontournable à la source d’eau chaude. Elle se situait (et se situe toujours près de l’Eglise). Cela sentait fortement le souffre, l’œuf pourri. Cette eau qui sortait à 77° servait occasionnellement à peler le cochon. Dans un bassin extérieur on pouvait s’assoir et tremper ses pieds dans l’eau chaude (30°) pour un moment curatif.
Puis on montait au Pas de la Case. Après avoir sinué dans la montagne on arrivait à un poste de garde et on montrait nos papiers d’identité. Quelques mètres plus hauts on arrivait au milieu de quelques bâtiments en planches dans lesquels on pouvait acheter à bas prix alcool cigarettes vin cuit dans des bouteilles recouvertes de paille et autres produits typiquement espagnols.

Pour aller à Andorre la Vieille c’était périlleux. La route n’était pas goudronnée, il fallait absolument laisser les vitres de la voiture fermées à cause de la poussière.

Pas de la Case -Années 50

Dans ma petite enfance, depuis Bordeaux, nous avions parcouru les grands cols pyrénéens : le Tourmalet, l’Aubisque, Aspin et bien d’autres endroits. Mais là il s’agissait de bien connaître « notre région ». Ses cols petits et grands, ses lacs, ses forêts, ses villages isolés. Un si petit département contenant de si beaux paysages.

Le mois de juillet s’écoulait lentement. Je jouais avec mes nouveaux amis. Nous nous rendions souvent à Milliane à l’ombre des grands platanes. Je prenais le vieux vélo de maman, celui qui avait échappé aux allemands en fuite contrairement à celui de papa et je faisais le tour de cette immense place. On allait se rafraîchir à la fontaine Ste Nathalène ou bien, sur une table improvisée, posée sur la place Albert Tournier, devant la maison, on jouait aux cartes.
Le soir on plaçait des chaises sur le trottoir ou dans le caniveau pour avoir les pieds sur le trottoir justement et on palabrait « on prenait le frais ». Toutefois il était prudent de ne pas se mettre sous les nids d’hirondelles pour ne pas se retrouver aspergés de fientes.
J’apprenais ces nouvelles expressions occitanes très couleur locale « à bisto de nas », « espanter », « récater » et je me suis mise à dire « boudu » et « é bé » en toutes occasions.  
J’avais désormais intégré la bande de Lestang.


Mais un grand chantier prévu au mois d’août nous attendait.
Il y avait eu depuis quelques temps un gros problème au cinéma. Maman avait dit « ça suffit ! » et papa avait tout organisé.

Le tissu en similicuir rouge des fauteuils déteignait les jours de pluie sur certains vêtements de spectateurs. Je me souviens d’une personne qui portant un très beau manteau blanc en entrant en était ressortie le dos rouge.
 A chaque fois mes parents étaient catastrophés et les spectateurs également bien entendu. L’assurance payait.
Cela avait dû se produire plusieurs fois avant l’arrivée de mes parents mais on ne leur avait rien dit.

C’est alors que maman s’était mise en colère et à demander à papa de trouver une solution.
Qu’à cela ne tienne !
Il se souvint de son premier métier : bourrelier.
Il motiva du personnel petits et grands il y avait du travail pour tous les âges.
Dans la rue Taillancier des garçons s’étaient instantanément proposés. Ils aidaient souvent mon père à de multiples tâches en retour ils voyaient les films à l’œil si je puis dire.

Papa avait commandé une énorme pièce de cuir (pas de simili cette fois-ci) couleur vert bouteille.
Il installa une grande table dans le sous-sol, bien au frais soit dit en passant, sur laquelle il recouvrira les fauteuils.
Les portes au fond de l’orchestre donnant dans la petite rue de Brentes furent ouvertes. C’est là que se passa une grande partie du chantier.

Les fauteuils furent démontés. Les pieds en fonte furent repeints avec une peinture dorée.
Les panneaux de contreplaqué à l’arrière des assises et des dossiers une fois dévissés étaient confiés aux plus jeunes pour les poncer et les revernir.

Ceux qui travaillaient au balcon avaient double peine. Ils démontaient, ils descendaient, ils remontaient, un travail pénible.
Une vraie chaîne s’était établie, une vraie fourmilière, dans la bonne humeur mais aussi la chaleur.

Les journées étaient bien remplies. Tout le monde était conscient de participer à la remise à neuf du cinéma.
Le soir tout de même il ne fallait pas nous bercer.

Quand la salle fut vide, maman aidée par une femme de ménage nettoya le plancher à grande eau et lessive, sans oublier d’enlever les chewing gum bien collés. Une fois par an j’aidais maman dans cette corvée à l’aide d’une spatule.

Au bout de plus de trois semaines tout fut remonté aux emplacements initiaux.

Dans le hall, papa procéda à l’habillage des comptoirs et des portes et le cinéma devenu vert allait pouvoir rouvrir ses portes.

Une grande réunion eut lieu dans le sous-sol pour remercier tout le monde. Le bar jusque-là inutilisé a bien tenu son rôle.

                                                                          *****

En septembre j’entrais en 6° un changement qui m’angoissait.
Je recouvrais avec application livres et cahiers d’un papier bleu, je collais une belle étiquette en haut à droite.
Maman avait acheté dans le magasin GUICHOU, place de la république, un nouveau tablier bleu et brodé mon nom en haut à gauche.
Je retrouvais mes camarades du cm2 et je faisais connaissance avec les internes.
La directrice m’avait classée « B » c’est-à-dire littéraire, je ferai donc du latin, sans aucun plaisir, et je porterai le célèbre  « Gaffiot » comme une croix. Les internes nous prêtaient gentiment leur casier pour entreposer, en dehors du cours de latin, ce très lourd dictionnaire.

L’hiver pointait son nez. Il sera aussi rigoureux que l’année précédente, les conduites d’eau regèleront. Nous logions  toujours dans des conditions précaires mais l’année se terminera par une très bonne nouvelle pour mes parents.

Au cours de la première Assemblée Générale de la société à laquelle mon père participait l’associé indélicat qui avait mis l’exploitation du cinéma en mauvaise posture fut évincé avec une forte majorité contre lui et fut contraint de démissionner. Le docteur ROQUEJOFFRE, l’un des principaux associés, eut un rôle déterminent dans cette première phase.
Mes parents ont alors, petit à petit, acheté les parts de tous les associés pour devenir propriétaires à part entière de la société d’exploitation.


                                                                             A suivre…






    
 








Propriétaire : C. Bros-Rouquette  Support Technique J-P Perrault

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